L'e-cigarette
Vie pratique

E-cigarette : craintes autour du programme gouvernemental de lutte contre le tabac

Le plan de lutte contre le tabac présenté fin novembre par le gouvernement ne fait pas l’unanimité, surtout en ce qui concerne les mesures liées à la cigarette électronique. Emballages neutres dès 2024, limitation du nombre d’arômes… Vendeurs et consommateurs s’inquiètent, et défendent l’efficacité de cette alternative dans le sevrage tabagique.

Mardi 28 novembre dernier, le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a présenté le programme national de lutte contre le tabac. Ce plan prévoit notamment de conditionner les cigarettes électroniques dans des emballages sans dessin ni couleur, au même titre que les cigarettes conventionnelles.

Cette mesure impacterait les représentants du secteur, déjà fragilisés par l’interdiction à venir de la puff, en raison de sa popularité chez les jeunes et de sa batterie en lithium qui nuit à l’environnement. « Ce produit est une aberration environnementale indiscutable. Mais instaurer un paquet neutre pour toutes les cigarettes électroniques, c’est les mettre sur le même plan que les cigarettes classiques, comme si elles étaient aussi dangereuses », souligne le président de la fédération France vapotage Vincent Durieux.

Ce dernier affirme qu’il suffirait de faire appliquer la loi pour protéger les mineurs du tabac. Pour rappel, les commerçants ne sont pas autorisés à vendre des cigarettes et vapoteuses aux Français de moins de 18 ans.  « À l’inverse de pays qui ont fait le choix d’accompagner les fumeurs avec des solutions à risques réduits comme le vapotage et ont obtenu de bons résultats – par exemple la Grande-Bretagne –, la France reste derrière la Grèce et la Bulgarie avec 12 millions de fumeurs », déplore Vincent Durieux.

Florent Biriotti, cofondateur de #Jesuisvapoteur, mouvement de défense de l’e-cigarette rassemblant des utilisateurs et professionnels du secteur considère pour sa part que « la mise en place du paquet neutre est une façon d’ôter toute attractivité à la cigarette électronique et de l’associer à l’industrie du tabac, alors que la plupart des acteurs du secteur n’ont rien à voir avec ce monde ».

Le programme gouvernemental envisagerait également de limiter le nombre d’arômes vendus dans l’e-cigarette. Le ministre de la Santé voudrait interdire les goûts sucrés ciblant essentiellement les jeunes consommateurs, au bénéfice de saveurs plus sobres telles que le tabac ou la menthe.

« Le risque, c’est que les autorités fassent des choix arbitraires et éliminent des arômes qui sont utiles au sevrage sous prétexte qu’ils pourraient séduire les jeunes. Qui vous dit que seuls les adolescents aiment les emballages colorés et les goûts barbe à papa ou marshmallow ? J’ai 45 ans, et regardez mon bureau », poursuit Florent Biriotti en pointant les nombreuses figurines en tout genre exposées sur ses étagères. D’après lui, la diversité des arômes fait l’attrait de la cigarette électronique, et donc son efficacité envers les fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer.

Bon nombre de consommateurs sont en effet attachés aux arômes de l’e-cigarette, comme Audrey, ancienne fumeuse de tabac et de cannabis, qui serait « bien embêtée » de devoir renoncer à ses saveurs préférées, comme la « tarte au citron ». « Si j’ai réussi à arrêter de fumer après vingt ans, c’est grâce à ça, car je ne supporte plus le goût et l’odeur du tabac », explique-t-elle.

De son côté, Teddy, vapoteur depuis 2017, aime surtout les arômes très sucrés, comme la pastèque et la fraise. « Ce sont ces saveurs qui font que le tabac me semble avoir mauvais goût », indique ce trentenaire, qui a dû se faire greffer une artère à la suite d’un accident. « C’est mon médecin qui m’a conseillé de me mettre à la vapoteuse pour éviter le goudron de la cigarette, mauvais pour les pontages ».

Soulignons toutefois que des professionnels valident la remise en question des arômes. C’est notamment le cas de Pascal, gérant d’un magasin de cigarettes électroniques à Rennes : « Je vois des gens garder leur cigarette électronique pendant des années. Certes, ils ont lâché le tabac, mais ils sont devenus accros aux arômes… », affirme-t-il. C’est la raison pour laquelle Pascal estime nécessaire de former tous les vendeurs à l’accompagnement du sevrage.

Les avis sont très tranchés dans la communauté médicale concernant l’efficacité de l’e-cigarette dans le sevrage tabagique. Des docteurs affirment que la cigarette électronique est une aide parmi d’autres. Au contraire, d’autres professionnels considèrent que c’est une porte d’entrée vers le tabagisme. « Il y a deux approches en France : celle, dominante, de la santé publique et de la pneumologie, pour qui en dehors de l’arrêt de la cigarette, point de salut ; et celle de l’addictologie, qui se situe plutôt dans l’optique de réduction des risques », informe le docteur Georges Brousse.

Ce professeur et chef du service d’addictologie au CHU de Clermont-Ferrand dit appartenir à la seconde école : « Évidemment, l’idéal est de ne rien consommer, mais certaines personnes ne le veulent ou ne le peuvent pas. Plutôt que de les laisser sur le bord du chemin, on propose une réponse graduée et personnalisée. »

Georges Brousse explique que, dans un cas d’addiction, une solution qui marche pour quelqu’un peut ne pas marcher pour quelqu’un d’autre. Il précise aussi que, « ce qui n’a pas marché hier marchera peut-être demain ». Cette solution peut être la e-cigarette dans certains cas. 

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