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Tabac et nicotine : Bruxelles prépare un virage historique

A l’occasion de la onzième Conférence des Parties (COP11) de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT), qui se tiendra à Genève du 17 au 22 novembre, l’Union européenne devrait prôner une politique restrictive vis-à-vis du tabac et la nicotine. Un mandat confidentiel adopté par le Conseil européen le 7 octobre informe que les États membres entendent soutenir les propositions les plus fermes de l’OMS, quitte à provoquer de fortes secousses économiques et agricoles dans un secteur déjà fragilisé.

Un mandat aligné sur la politique de l’OMS

Adopté à Bruxelles, ce mandat confirme la volonté des Vingt-Sept d’un durcissement global des politiques antitabac, en totale cohérence avec les orientations de l’OMS. Le texte prévoit d’étendre aux produits nicotiniques alternatifs (cigarettes électroniques, tabac chauffé, sachets de nicotine…) les mêmes restrictions que celles déjà appliquées au tabac combustible.

Présentés par leurs partisans comme des outils de sevrage, ces produits sont désormais perçus par l’Union comme de nouveaux vecteurs de dépendance. Le document recommande ainsi une régulation « stricte ou une interdiction » de ces dispositifs, estimant qu’ils entretiennent l’addiction plutôt qu’ils n’en facilitent la sortie.

Des conséquences économiques et sociales majeures

Le mandat européen ne se limite pas aux considérations sanitaires. Il propose de repenser en profondeur la structure du marché du tabac sur le continent. Parmi les pistes évoquées figurent la réduction du réseau de distribution, un contrôle renforcé des prix et un encadrement plus strict des marges commerciales. Certaines formulations laissent même entrevoir la disparition progressive des activités lucratives liées à la vente de tabac.

Cette perspective inquiète les professionnels du secteur, notamment les buralistes en France, en Espagne ou en Pologne, qui redoutent une chute significative de leurs revenus. Plusieurs organisations syndicales dénoncent une politique élaborée sans réelle concertation, jugeant qu’une régulation trop centralisée risquerait d’affaiblir les circuits légaux et d’encourager le marché noir.

Une filière agricole sous pression

La reconversion progressive des terres consacrées à la culture du tabac fait également partie des orientations envisagées par Bruxelles. Si cette évolution est saluée par certains acteurs environnementaux, elle suscite une vive inquiétude dans les régions productrices.

Dans plusieurs États membres, la culture du tabac demeure en effet une source essentielle de revenus pour de nombreuses exploitations rurales. Sa disparition progressive pourrait fragiliser des milliers d’agriculteurs et accélérer la désertification de territoires déjà durement touchés par la crise économique.

Filtres et environnement : une mesure discutée

La question des filtres de cigarettes occupe une place importante dans le projet européen. Bruxelles souhaite leur interdiction, invoquant la lutte contre les microplastiques et la volonté de rendre la consommation de tabac moins attractive. Cette mesure, toutefois, divise les experts.

Certains y voient un signal fort sur le plan environnemental, tout en doutant de son efficacité réelle sur le plan sanitaire. D’autres rappellent que les filtres influencent la manière d’inhaler la fumée et que leur suppression pourrait accroître l’exposition des fumeurs aux substances toxiques. Plusieurs observateurs craignent enfin qu’en l’absence de mesures d’accompagnement, une telle interdiction ne favorise le recours à des produits non réglementés ou issus du marché noir.

La Suède, une voie alternative écartée

La stratégie défendue par Bruxelles s’écarte du modèle suédois, souvent cité comme une réussite en matière de lutte contre le tabagisme. En encadrant strictement l’usage des sachets de nicotine et en privilégiant la réduction des risques plutôt que l’interdiction, la Suède est parvenue à faire chuter le taux de tabagisme à moins de 5 % de la population — un seuil défini par l’OMS comme « sans fumée ».

Ce succès, fondé sur une approche pragmatique et une prévention ciblée, interroge aujourd’hui les choix européens. Alors que l’Union semble privilégier une politique plus uniforme et coercitive, il reste incertain qu’un tel virage permette de réduire durablement le tabagisme sans fragiliser davantage des équilibres économiques et sociaux déjà précaires dans plusieurs États membres.

Léa M.

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